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Poésies Jean-Luc OTT

D’où vient qu’il fait si froid soudain ?

Extraits

 

II

 

Déjà tu n'as plus en toi

l'envie de te mouvoir

La vie s'apaise

Le sommeil t'appelle

de très loin.

Et tu ne réponds plus

quand s'allume la lumière

 

De tes yeux effrayés

la couleur s'est brûlée.

 

Entends-tu encore le printemps

qui guette au mouvement de l'air

Il est à d'autres ce souffle du vent

chargé de bruits lents et mouillés.

 

V

J'imagine comme une lutte silencieuse

et le désir d'en finir

Est-ce là qu'il faut convier les anges

et les trompettes du ciel ?

 

Dans cette lumière criarde et blanche

Les pas feutrés les langues douces

et la substance qui anéantit la douleur

fait son travail de titan.

 

VIII

 

Le vent pénètre malgré tout

et le froid s'installe dans chaque membre

Ne pas bouger car le moindre mouvement

ferait fuir l'animal farouche

 

Pourquoi retarder l'heure

alors que nous aspirons à la délivrance

 

Tu vis en nous ce que nous

ne regardons plus

Et ne répondis que par silence

comme ferait la première neige

sur la pointe des sapins

pour les tendre vers le ciel.

 

XI

 

Se peut-il que le jour se lève

dans l'orangé d'un lampadaire

Quand retentissent les premiers pas

et pénètre dans ma nuit

une aurore refusée.

 

D'où vient qu'il fait si froid soudain

 

Mon corps tombe en douce matière

serein comme un passage de tortue

marine dans l'immensité du monde.

 

XIV

 

Au réveil tout est blanchi de froid

sans même une neige

Les feuilles encore vivantes sont

comme une langue molle rétractée

 

J'entre au plus chaud de moi

parmi les songes hagards

Sont-ce seulement des songes

ou des terreurs animales

 

Jamais je n'apprendrai l'humanité

par la vie quand m'accueille

le silence des ruines.

 

XVII

 

Tu sais ou tu ne sais plus

enfin tu savais la chaleur de chaque chose

 

La douleur faillible des mains

lorsqu'on ne sait ni donner ni recevoir.

 

J'ai dans l'idée que tu ne voudras pas

de mes poèmes pour ton voyage

à travers les arides silences.

 

Attache le fil à ton poignet

si cela te rassure

jour après jour je le rembobinerai

docile

comme seul un animal saurait le faire.

 

Devenir adulte c'est se glisser dans l'eau

et n'entendre que les voix du passé

des-assouvir chaque rêve.

 

XVIII

 

Dimanche, vol léger

d'une aile blanche

à travers la vitre est passé

 

C'est un oiseau qu'on ne retient pas

 

Comment prendre conscience du froid

en soi

qui recouvre toute chose

effleurée

 

C'est l'hiver à qui j'ouvre mon lit

Et tout mon être ne connaît plus

Que vent, pluie et grésil.

 

XIX

 

Ce matin tout est blanc et irréellement beau

L'attirail d'amarre s'est tu

et plus un souffle ne trompe l'air

 

Une mer de calme envahit mes yeux

de cette étrange douceur qui rappelle noël

un instant suspendu et illimité

comme le silence avant la paix

Quand toute inquiétude cesse puisqu'il

n'est plus besoin d'espérer.

 

Mon grand besoin de neige est assouvi

 

Seules de fragiles traces d'oiseaux

font comme un piqué d'aiguilles

dans le linceul de neige

Un nouvel égarement.

 

XX

 

Les fleurs sont flétries

dans leur eau sucée

aucune main ne prend

la peine de les jeter

 

Ton sommeil aussi appauvrit l'air

comme si tu l'emportais

ce bagage ne sera pas trop lourd

 

Laisse-toi porter

l'heure est une messagère minutieuse

elle t'aborde sans violence

 

Que sont devenus les pourparlers

qui tracent les frontières

entre ce qui pèse

et ce qui n'est rien.

 

Le long février n'en finit pas

de répandre ses froids drus

je pense à toutes ces choses fragiles

ces souris fiévreuses des instants passés.

 

XXII

Je ne veux pas savoir

Comment tu glisses vers le néant

Comment en face tu regardes

La terre jetée sur toi

 

Si tu parles encore c'est de ta petite voix

quasi muette de mère

de celle qu'on lit sur les lèvres

quand les ressources manquent

 

Si la force de l'inhumain dieu

est invincible à quoi bon

regarder en arrière la pièce jouée

 

Ainsi avance la tortue malhabile

Et ferme des yeux desséchés.

 

XXIII

 

Dessus les tombes fraîches

les vents tiédissent.

 

Nous viendrons chargés de fleurs

comme pour une nouvelle maternité

 

S'il y a plus d'une nuit à venir

c'est qu'ils dormiront longtemps.

 

10-25/02/2018

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